Pétition : Manifeste des professionnels de la PJJ

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Mobilisation PJJ

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Manifeste des professionnels de la PJJ
Cet appel est à l’initiative des personnels de la PJJ du 93 et de l’île de France. Il reprend la suite d’un appel national pour la défense de la double compétence civile et pénale de la PJJ, signées par les organisations suivantes : SM, AFMJF, SNPES/PJJ-FSU, SNP, SNUCLIAS-FSU, Solidaires Justice, FSU,…..
 
 
Manifeste
des professionnels de la PJJ
A l’initiative du Snpes-Pjj-Fsu et des comités d’action et de mobilisation de l’IDF-syndiqués et non-syndiqués.
Appel à la résistance
Pour le maintien de la double compétence civile et pénale à la Protection Judiciaire de la Jeunesse
Pour le maintien d’une justice spécifique des mineurs

 
« Il est peu de problème s aussi graves que ceux qui concernent la protection de l'enfance, et parmi eux , ceux qui ont trait au sort de l'enfance traduite en justice (...) la République Française entend protéger efficacement les mineurs , et plus particulièrement les mineurs délinquants » Exposé des motifs – Ordonnance de 1945
 
L’Ordonnance de 45 se fonde sur la primauté des réponses éducatives lorsqu’il s’agit d’apporter des réponses aux actes de délinquance commis par des mineurs.
L'Ordonnance de 1958 sur l’assistance éducative a conforté une approche globale des mineurs en danger comme étant du ressort d’un juge des enfants.
La protection judiciaire de la jeunesse est le seul service éducatif public qui rend visible, notamment auprès du juge des enfants, la pertinence d’une approche et d’un suivi socio-psycho-éducatif communs aux mineurs en danger qu’ils aient ou non commis un délit.
Cette double compétence de la PJJ a enrichi, depuis 50 ans, les connaissances et les pratiques des professionnels concernant ces enfants et ces adolescents. Elle a permis de resituer les actes délinquants dans un contexte et une histoire de vie, de percevoir les mineurs comme des êtres en devenir, éducables, en conciliant le plus possible le temps de l’adolescence, qui n’est jamais linéaire, et le temps judiciaire.
Jusqu’à aujourd’hui ce dispositif original, qui a servi de modèle à de nombreuses législations européennes, a montré sa pertinence. Il a été porté par l’ensemble des professionnels de l’enfance : juges, psychologues, assistants sociaux, éducateurs, avocats, psychiatres.
Pourtant, la direction de la PJJ a décidé brutalement d’y mettre fin. Elle annonce l’arrêt de la quasi-totalité des prises en charge au civil dès janvier 2009, informant les juges des enfants que leurs décisions ne seront plus mises en œuvre, et affiche le refus de comptabiliser ces mesures dans les effectifs des services. Au nom d’une répartition des compétences état/conseils généraux et d’une rationalisation de ses moyens budgétaires, la direction de la PJJ a décidé unilatéralement de transférer toute l’assistance éducative. Comment croire la direction de la PJJ qui prétend qu’une partie de cette charge sera absorbée par le secteur habilité alors que dans le même temps elle vient d’amputer 35% de son budget ! S’inscrivant, (en l’anticipant) dans la ligne du rapport Varinard, la direction de la PJJ est revenue sur sa décision initiale d’arrêter progressivement d'ici 2011 et partiellement (on ne parlait pas alors d'’extinction) son intervention concrète auprès des mineurs en assistance éducative.
Cette injonction administrative brutale est en contradiction complète avec les dispositifs législatifs en vigueur, à savoir la loi de 1958 instituant l’assistance éducative, nullement abolie par la loi de mars 2007 et ses préconisations en matière de déjudiciarisation de la protection de l’enfance. Elle ne s’opère qu’à partir d’une circulaire d’orientation budgétaire. Cette injonction est donc non seulement d’une légalité douteuse, mais elle entraîne déjà des suppressions de postes et des fermetures de structures.
Dans le même moment est annoncée l’annulation imminente du décret de 75 portant sur la Protection des Jeunes Majeurs dont la mise en œuvre était du ressort de la PJJ. Il permettait d’accompagner encore quelques temps des jeunes adultes de 18 ans pour lesquels une consolidation du travail effectué auprès d’eux mineurs, était nécessaire. Bien sûr, il s’agissait le plus souvent des jeunes majeurs les plus démunis ou les plus fragilisés. C’est dorénavant les seuls Conseils Généraux, avec les services de l’Aide Sociale à l'Enfance, qui devront faire face à ces demandes sous une forme contractualisée, en l’absence totale de transferts de moyens donc de garanties de leur capacité à assumer ces nouvelles prises en charge. L’équité des réponses sur le territoire national, garantie par le service public de la PJJ et sa compétence d’Etat, disparaît avec les risques évidents d’inégalité de traitement d’un département à un autre.
Déjà, depuis 2008, la direction de la PJJ demande aux personnels de prendre en charge en priorité les mesures pénales en cas de listes d’attente dans les services de milieu ouvert. Alors que le décret de 75 sur la protection judiciaire des jeunes majeurs n’est pas encore abrogé, elle a imposé aux services de justifier au cas par cas la nécessité pour ces jeunes de bénéficier de mesures de Protection Jeunes Majeurs ou leur a refusé l’accès aux dispositifs d’hébergement. Elle exige de réserver les places dans les foyers éducatifs pour les seuls mineurs suivis dans un cadre pénal, excluant ainsi de nombreux jeunes pour lesquels cet hébergement éducatif peut constituer un cadre protecteur indispensable.
Par ailleurs, les préconisations de la commission Varinard, rendues le 03 décembre 2008, concernant la refonte de la justice des mineurs, inquiètent vivement les professionnels de la PJJ. En effet, elles opèrent d’une conception, sécuritaire et réactionnaire de la justice des mineurs et liberticide à l’égard des mineurs. En faisant des choix univoques de procédures et de mesures répressives combinées à l’extension des possibilités d’incarcération, ce type de traitement de la délinquance des mineurs favorisera inexorablement l’emprisonnement de la jeunesse (le ‘’bon sens’’ n’épargnera aucun !). D’autant plus aisément que la PJJ serait spécialisée dans des missions d’exécution de peines et de ‘’sanctions éducatives’’ (peines déguisées). Avec la suppression préconisée des mesures éducatives au pénal, la PJJ disparaîtrait en tant qu’institution éducative et deviendrait un service de probation pour mineurs. Les pires hypothèses se confirment :
  • Premier acte de délinquance géré par les conseils locaux de sécurité et donc par les maires
  • Création d’une « sanction de l’inexécution de la sanction éducative » , qui peut se décliner par une mesure de placement en fin de semaine, et à partir de 14 ans d’incarcération de week-end.
  • Instauration du contrôle judiciaire et de la garde à vue dès 12 ans avec possibilité de retenir les enfants de moins de 12 ans 6 h renouvelables une fois.
  • Création d’un mandat de placement délivré aux directions départementales afin de procéder à des placements sans délai
  • Multiplication et diversification de centres éducatifs fermés selon le profils des mineurs
  • Création d’un cadre juridique pour les mineurs en fugue des foyers
  • Création d'un tribunal à juge unique qui pourra prononcer des peines allant jusqu'à 5 ans d'incarcération.
  • Création d’un tribunal correctionnel proche de celui des majeurs pour les mineurs récidivistes de 16 ans avec des peines conformes au régime applicable aux majeurs et une spécialisation réduite au strict minimum.
  • Accélération des procédures, Création de nouvelles peines
  • Possibilité de juger en assises des faits criminels commis par des mineurs de moins de 16 ans en cas de récidive entre 16 et18 ans.
 
  • Mesures d’investigation réduite à 1 ou3 mois pour la constitution d’un dossier de « personnalité ».
  • Création d’un établissement  « PJJ/psychiatrie » par région pour la prise en charge des "troubles limites" (les incasables ?) assimilés à celle des « psychopathies », dont les modalités de conventionnement, de fonctionnement et la finalité restent obscures.
 
Enfin la commission Varinard préconise la fin de la double compétence pour le service public de la PJJ.
Ces propositions remettent en cause radicalement la spécificité de la justice des mineurs (primauté des réponses éducatives, spécialisation des juridictions, atténuation des peines). Elles mettent irréversiblement en péril l’idée même d’éducation pour les enfants qu’ils soient ou non auteurs de délit.
Dès maintenant, quelle est la responsabilité de la direction de la PJJ par rapport aux mineurs en danger confiés aux services de la PJJ et dont les situations ne sont pas prises en charge ?
Demain, qu’en sera-t-il de la continuité du suivi des jeunes, pour lesquels une mesure d’assistance éducative est nécessaire dans la suite du travail effectué dans une Investigation Orientation Éducative ou de toute autre mesure? Au prétexte de rationalisation économique, cette politique de l’administration de la PJJ, en compromettant l’avenir de nombreux jeunes, aura, à l’inverse un coût humain désastreux. Ce faisant, elle prive les magistrats de la jeunesse d’une partie des orientations dont ils disposent vers des services qu’ils jugent compétents pour mettre en œuvre, à chaque fois de manière singulière, l’accompagnement des adolescents les plus en difficulté.
Elle marginalise ceux pour lesquels une mesure au civil permettait une continuité du suivi, lorsqu’elle s’avérait nécessaire suite à leur mesure éducative au pénal terminée. Elle entérine une séparation artificielle et stigmatisante entre les jeunes en danger et les jeunes auteurs de délits dont la prise en charge sera centrée sur le traitement de l’acte et donc décentrée du jeune et de ses difficultés, celles-là mêmes qui l’ont conduit vers la délinquance. L’accompagnement des jeunes n’y gagnera ni en qualité, ni en efficacité.
Que restera-t-il de la spécificité de la justice des mineurs si l’idée d’éducation est ainsi vidée de son sens ?
 
En dessaisissant le service public de sa mission de protection, la direction de la PJJ prend la lourde responsabilité de laisser des adolescents en danger sans prise en charge véritable et d’abandonner ainsi les interventions susceptibles de prévenir des passages à l’acte délinquants.
 
La PJJ doit continuer à mettre sa compétence au service d'une approche globale de la protection de l'enfance.
 
C’est pourquoi nous, professionnels de l’enfance et de l’adolescence en difficulté, du service public de la PJJ, n’appliquerons pas cette politique. Nous dénonçons aussi les propositions contenues dans le rapport Varinard qui remettent en cause l’existence même des tribunaux pour Enfants.
 
Nous vous appelons à nous rejoindre très nombreux, en signant cet appel.
 
 

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Signataires
Delphine Andrieux, éducatrice à la PJJ, 77
Sylvie Angiolini, éducatrice à la PJJ, 75
Isabelle Aubry, éducatrice à la PJJ, 75
Marie-Josèphe BERTRAND, psychologue à la PJJ, 75
Marie-Claude Benezet, éducatrice à la PJJ, 93
Sonia Casagrande, éducatrice à la PJJ, 93
Nanni Cervo, éducatrice à la PJJ, 92
Fabrice Chauvet, éducateur à la PJJ, 93(mis à disposition à la MDA d’Avicenne)
Johanna Clémente, éducatrice à la PJJ, 94
Nicole Cosson, psychologue à la PJJ, 78
Cécile Cottin, psychologue à la PJJ, 93
Elise Desjardins, professeur technique à la PJJ, 93
Lysia Edelstein, psychologue à la PJJ, 93
Michel Faujour, professeur technique à la PJJ, 93
Samia Hamiche, éducatrice, 75
Martine Hannoun, chef de service éducatif à la PJJ, 92
Zaïa Hassili, adjointe administrative à la PJJ, 78
Pascal Lamara, éducateur à la PJJ, 75
Nina Laurent, éducatrice à la PJJ, 93
Michèle Krum, directrice à la PJJ, 75
Thomas Langlot, éducateur à la PJJ, 93
Viviane Labadie, psychologue à la PJJ, 78
Sylvie Le Gallo, assistante de service social à la Pjj, 75
Joëlle Le Scraigne, éducatrice à la PJJ, 94
Carlos Lopez, éducateur à la PJJ, 77
Karine Madelaine, éducatrice à la PJJ, 94
Stépahnie Malaval, éducatrice à la PJJ, 75
Dalila Megherbi, éducatrice à la PJJ, 95
Véronique Melchior, psychologue à la PJJ, 95 (mise à disposition au TGI 75)
Soria Mellouki, éducatrice à la PJJ, 95
Philippe Nonnenmacher, directeur à la PJJ, 94
Sonia Ollivier, éducatrice à la PJJ, 75
Nathalie Perez, éducatrice à la PJJ, 95
Anaïs Picar-Montagard, assistante de service social à la PJJ, 93
Claire Policella, psychologue à la PJJ, 95
Alexia Peyre, psychologue à la PJJ, 93
Jean-Paul Ravaux, éducateur à la PJJ, 93
Catherine Ruault, éducatrice à la PJJ, 94
Christine Sylva, éducatrice à la PJJ, 78
Philippe Tenaud, éducateur à la PJJ, 93
Martine Thomas, psychologue à la PJJ, 75
Cécile Verrien, éducatrice à la PJJ, 78